Shree Adarsha Secondary School

IMG_6921

Cette dernière semaine commence par ma venue pour une seule journée à l'école Shree Adarsha Secondary School où je vais intervenir pour faire du storytelling. Cette école est l'équivalent de notre collège/lycée et le but était que je parle aux deux plus grandes classes de l'école. J'avais juste à raconter mon histoire, qui j'étais, comment je suis venu au Népal et pourquoi. Peace4people travaille depuis plusieurs années avec cette école et comme l'école primaire où je suis intervenu le niveau d'anglais est assez faible. Pour preuve le professeur d'anglais qui devait traduire mon intervention a démissionné deux jours plus tôt. Rien n'est facile au Népal et du coup Santosh a fait la traduction de mon discours.

On a emmené tous les enfants dehors et on les a mis en cercle pour que je me retrouve au centre d'eux et puis j'ai commencé à parler. Je leur ai évoqué mes rêves, mes passions mais aussi les leurs, l'objectif est de leur montrer qu'ils doivent croire en leurs rêves car la vie est courte et qu'il faut se battre tous les jours pour ses envies. Rien que ma venue est une source d'inspiration pour eux car ils n'ont jamais vu quelqu'un venir pour eux et leur parler, donc quand on leur explique qu'un français vient dans leur école juste pour eux c'est plus que gratifiant pour eux, surtout quand la majorité d'entre eux font partie des castes les plus basses du Népal.

Pendant mon intervention j'ai eu encore un coup du destin.. En demandant le rêve de chacun j'observe que beaucoup veulent devenir chanteur. Soit, mais les enfants népalais étant très timides je me dis que je vais pousser un étudiant pour qu'il chante devant moi et tout le monde. Si ton rêve est de devenir chanteur alors chante, exprime toi et montre ton talent et ta confiance à tout le monde. Ne me demandez pas pourquoi je suis allé vers cette jeune fille mais elle me paraissait encore plus timide que les autres, avec une posture très renfermée, jackpot c'est pour toi tu n'as plus qu'à chanter. Et alors comment dire que j'ai rarement été aussi ému. Je n'ai jamais entendu une voix aussi pure et limpide que la sienne, je me sentais privilégié d'écouter sa magnifique voix. Il lui a fallu du temps pour sortir le premier son mais une fois lancée, c'était juste magique, un moment de légèreté dans ce monde de brutes. Je ne sais même pas son nom mais une chose est sûr je me souviendrais toute ma vie de cette étudiante au timbre de voix incroyable et qui m'a permis d'écouter le talent qu'elle cache profondément derrière sa timidité plus qu'apparente.

Parler de sa vie, de qui on est, de ce que l'on fait et pourquoi on le fait est juste le meilleur truc au monde. Je fais ce qu'il me plait dans ma vie donc l'expliquer aux autres est clairement génial. Sentir que ma vie normale peut inspirer la vie de dizaines d'enfants est très gratifiant et je me sentais très honoré d'avoir la chance de participer à ce storytelling. Sacré Santosh, il m'aura fait vivre des choses incroyables..

Au revoir

Il est important pour moi de prendre le temps de remercier la famille de Santosh qui m'a accueilli dans leur village.

Merci à son grand-père qui a été un amour avec moi, bienveillant comme c'est pas permis. Je vais dehors pour m'asseoir et profiter de la vue mais il n'y a plus de petit tabouret pour m'asseoir il se lève et me passe le sien. Un homme de 80 ans qui a vécu des milliards de choses et qui ne voulait que mon bien alors que je ne suis qu'un étranger du bout du monde pour lui.

Merci à sa mère qui est au four et au moulin, la première levée à 4h et la dernière couchée à 22h. Elle me disait "welcome" dès que je lui disais merci en népalais quand elle me servait à manger, m'apportait le thé. Un amour de femme qui me regardait comme une mère regarde un fils, elle était aussi d'une bienveillance incroyable.

Merci à son père qui est un homme un peu rustre et distant au premier regard mais qui est un ange quand on passe du temps avec lui. J'ai rarement autant ri avec une personne qui ne me comprenait pas, dès qu'on se regardait on rigolait car je me faisais dévorer par les moustiques ou parce qu'il se passait quelque chose de drôle. C'est un prêtre de l'hindouisme et il m'a montré sa culture et sa religion avec une rare patience.

Merci à sa soeur Laxmi, qui s'est moqué de moi un nombre incalculable de fois. Des choses qui sont faciles pour un népalais n'étaient pas évidentes pour moi et c'était la première à en rigoler. Dès que je me levais son grand-père criait son nom pour qu'elle m'amène le thé et elle arrivait toujours avec le sourire me l'apporter, encore plus quand j'étais malade. En parlant de maladie elle a pris le temps de me cuisiner des choses rien que pour moi pour que j'aille mieux, tout en rigolant quand elle voyait que j'étais tout faible.

Merci à Pravakar, le neveu de Santosh, qui au lieu de vivre dans la maison d'à côté, vit chez son grand-père pour veiller sur lui la nuit au cas où quelque chose arrive. Il a aussi veillé sur moi tous les jours quand j'étais malade et quand je ne l'étais pas car au Népal il n'y a pas vraiment d'intimité et il ne faut pas rester seul. C'est dans la culture, tout le monde vit avec tout le monde.

Je pourrais remercier encore plein de personnes du village mais je m'arrêterais juste à Nabaraj. Un homme en or, toujours présent pour Santosh et pour moi, le premier à vouloir rester à l'hôpital avec moi, le premier à se moquer de moi, le premier à vouloir faire des activités comme d'aller à Pokhara, jouer aux cartes ou d'aller à l'école. Il m'appelait "Mister Guiraïdo" et m'a montré ce qu'était l'hospitalité népalaise : deux hommes sont venus vendre des vêtements au village et vu qu'il se faisait tard il leur a dit de rester chez lui dormir et manger car il était trop tard pour rentrer chez eux. Il ne les as jamais vu et ne les reverra peut-être jamais mais ils étaient dans le besoin.

De gauche à droite : Santosh, son père, son grand-père, son cousin, Pravakar, Nabaraj, sa mère.
De gauche à droite : Santosh, son père, son grand-père, son cousin, Pravakar, Nabaraj, sa mère.

J'avais prévu de faire un petit discours avant de leur dire au revoir mais après 3 mots je me suis effondré. Effondré car je me suis retenu toute la mission de vraiment pleurer, je pensais être suffisamment solide pour rester digne devant un peuple aussi brave, mais j'ai craqué je ne leur ai jamais dis ce que je pensais d'eux, de l'estime que j'ai pour eux, de l'honneur d'avoir vécu chez eux, et à quel point je les aime. Mais je me dis que mes larmes avaient peut-être valeur de mot ce jour là. Et qu’ils ont vu à travers la peine que j’avais de les quitter à quel point je les aimais. Le destin a fait que je suis né en France, le destin m'a emmené au Népal et je remercie ce destin car j'ai une magnifique famille ici en France mais maintenant dans mon coeur ils font aussi parti de ma famille. Merci, merci pour tout.

Derniers jours à Kathmandu :

Me voila parti de Dhading et comment dire que ce trajet en bus pour rentrer à Kathmandu fût long, très long. Je n'ai pas réussi à décrocher un mot à Santosh, comment parler après avoir dit au revoir à sa famille qui m'a tellement soutenu.. Pour couronner le tout il y avait un sommet international avec plusieurs pays voisins du Népal qui a complètement paralysée la capitale et donc provoqué des bouchons monstres. Finalement on arrive chez Santosh après 5h30 de trajet.. 5h30 de trajet pour 45 km avec 25°C et 100 % d'humidité, je peux le dire ce n'est pas évident mais bon comme me disait Santosh : "It's Nepal man".

Santosh m'a clairement dit que mon travail ici était terminé il ne voulait même pas que je l'aide sur différents projets, il m'a dit de me reposer et de profiter un maximum de Kathmandu et de mes dernières heures au Népal. Ainsi on a fait quelques visites comme les magnifiques temples bouddhistes de Swayambunath ou juste se perdre dans les rues de cette capitale ultra polluée mais si atypique.

IMG_7150_edited
IMG_7169_edited
IMG_7226_edited
IMG_7239_edited

Puis vint l'heure du débriefing, poser des mots sur un mois et demi de mission et donner mon ressenti à Santosh. Les Népalais sont d'une rare fierté et ils sont très braves mais pour la première fois depuis mon arrivée au Népal j'ai vu dans les yeux de Santosh une fragilité qui m'était inconnue et ce que nous nous sommes dis restera à jamais dans ma mémoire pour plusieurs raisons. Au delà du travail de terrain je me suis rendu compte que cet homme de 31 ans était comme un grand frère pour moi, une personne que l'on veut rendre fier et à qui on veut ressembler car c'est un modèle pour soi. Ce débriefing fut une sorte de lettre ouverte de nos pensées et ce fût incroyable. Je souhaite à tout le monde de rencontrer dans sa vie une personne que l'on estime, que l'on admire, qui nous fascine et qui grâce aux évènements de la vie devient un proche, un ami, un frère, un model.

Ce débriefing fut coupé par la venue de sa femme et de ses deux enfants venus me dire au revoir une dernière fois car cette discussion est intervenue quelques heures avant que je prenne mon avion. Cette famille est incroyable, ils m'ont tellement bien accueilli que je n'ai plus de mots. Ils ont tout fait pour que je me sente bien, que je profite au mieux de leur pays et de leur culture et je peux te le dire ils ont réussi. Une partie de mon coeur est à présent Népalais.

Une dernière fois merci Santosh, ce dernier paragraphe est pour toi car c'est grâce à toi que tout cela est arrivé. Tu m'as dit à maintes reprises que j'étais un leader que je devais inspirer les gens car je suis habité par une motivation qui anime ma vie mais le seul leader que je connais c'est toi. Un homme qui dédie sa vie à son peuple, à son district au détriment des fois de sa propre vie ou de sa famille. Tu es un humanitaire incroyable, mais au delà de ça tu es un être humain entier qui mérite de réussir dans tous tes projets. Je te remercie pour la personne que tu es, de m'avoir accueilli dans ton quotidien comme si j'étais de ta famille. Je pourrais écrire des heures sur toi pour exprimer l'estime et le respect que j'ai pour toi, merci encore pour ce que tu es et ce que tu fais. Malgré tous les problèmes de ton quotidien, tu inspires des milliers de personnes de par tes actions et ta dévotion. Merci pour tout Santosh, merci d'inspirer ma vie au quotidien.. Juste merci.

IMG_6452_edited

Voilà un saupoudrage de ce que j'ai fait au Népal, je n'ai pas marqué des milliards de choses que j'ai vécu mais il y a déjà assez de contenu pour comprendre un minimum ce que j'ai vécu et imaginer ce que j'ai pu un peu ressentir. Ecrire cela a été plus que dur car mettre des mots sur une chose aussi incroyable fut clairement un défi pour moi, alors j'espère que tu as apprécié et que j'ai éveillé ou réveillé en toi une âme d'humanitaire car ce que j'ai vécu n'est pas réservé qu'à moi ou à une poignée de personnes dans le monde, tout le monde peut faire de l'humanitaire.

Pour conclure j'aimerai te dire une phrase que Santosh m'a dit à mon arrivée au village :

"Tu vois Terry comment la vie est belle." "Oui elle est magnifique, ton peuple, ton pays, tout est magnifique ici." "Oui mais au delà de ça tu peux aisément voir que l'on a rien mais on est vraiment heureux. On a pas besoin de grand chose pour être heureux, être avec des personnes que l'on aime et un endroit pour s'asseoir et discuter."

Conversation d'un jeune français au bout du monde avec Monsieur Santosh Bidari, créateur et responsable de l'association Peace4people.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *